PREEMPTION - Le juge de l'expropriation doit tenir compte de la commission de l'agent pour fixer le prix mais sans pouvoir la supprimer ou la réduire
On savait que le juge de l'expropriation, saisi dans le cadre judiciaire d'une procédure de préemption pour fixer le prix du bien exproprié est compétent pour compter en sus du prix la charge de la commission de l'agence immobilière qui a négocié la vente entre le propriétaire et l'acquéreur évincé.
Mais il n'avait jamais été décidé jusqu'à l’arrêt précité de la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation du 14 décembre 2017 n°16-20.150 (voir ici l'arrêt) que le même juge de l'expropriation est incompétent pour statuer sur la demande de réduction ou suppression de la commission de l'agence en considération des fautes que l'agent aurait commises dans l'exécution de son mandat.
La Cour a motivé sa décision de la manière suivante : « Mais attendu que le juge de l'expropriation, qui est compétent pour déterminer, en fonction des indications figurant dans l'engagement des parties et dans la déclaration d'intention d'aliéner, si l'organisme qui exerce son droit de préemption est tenu, en ce qu'il est substitué à l'acquéreur, de prendre en charge la rémunération de l'intermédiaire immobilier, ne l'est pas pour réduire ou supprimer cette rémunération en considération des fautes que celui-ci aurait commises dans l'exécution de sa mission ; qu'ayant, à bon droit, relevé que tant le principe même de la rémunération que son montant et son imputation au vendeur ou à l'acquéreur était le résultat de négociations ayant abouti à un contrat avec un agent immobilier qui n'était pas dans la cause, la cour d'appel en a exactement déduit que le juge de l'expropriation, juridiction d'exception, était incompétent pour statuer sur la demande ».
Il y a donc deux raisons à l'incompétence du juge de l'expropriation sur le sujet:
La première est que le juge de l'expropriation reste une juridiction d'exception : le juge de l'expropriation, juge spécialisé, ne peut se prononcer que sur les questions précises qui lui ont été attribuées par le Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ou par le Code de l'urbanisme. Il a donc entre autres mais spécifiquement pour mission de fixer les indemnités d'expropriation (C. expro., art. L. 323-4) et de fixer le prix, dans les cas où un texte législatif ou réglementaire prévoit la fixation d'un prix ou d'une indemnité comme en matière d'expropriation, (C. expro., art. L. 331-2). C'est le cas, notamment, des prix en matière de préemption dans les ZAD ou les zones de droit de préemption urbain. Inversement, lorsqu'il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit ou sur la qualité du réclamant, et toutes les fois qu'il s'élève des difficultés étrangères à la fixation du montant des indemnités ou à l'application des procédures prévues au Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, le juge règle l'indemnité indépendamment de ces contestations et difficultés sur lesquelles les parties sont renvoyées à se pourvoir devant qui de droit (C. expro., art. L. 311-8).
La seconde est que l'agent immobilier qui voit sa commission contestée par l'organisme qui a préempté n'est pas dans la cause, et n'a d'ailleurs pas à s'y trouver quand le juge de l'expropriation est saisi dans le cadre des articles L. 213-11 et R. 213-11 et suivants du Code de l'urbanisme. Statuer sur la réduction ou la suppression de la commission de l'agent au motif qu'il aurait commis des fautes dans l'exécution de sa mission serait une atteinte au principe de la contradiction (CPC, art. 14), puisque n'étant pas entendu ou appelé en cause, l'agent ne peut par hypothèse présenter une quelconque argumentation pour la défense de son droit.
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